Ziou , Je rentrais la tête, haussais les épaules. Je prenais la position de survie, sans doute un réflexe vieux comme le monde. Je passais la main sur mon crâne. Non, rien. La douleur était aussi fictive que ridicule. J’aurais pu chercher longtemps le coupable si, du dessous de la gouttière, un piaillement insolent m’invectivait. Ma peur, mon étonnement, ne me permettaient pas de répondre, de demander à cet emplumé si son retour de migration s’était mal passé, s’il n’aimait pas la couleur de mes cheveux ou s’il était allergique à mon accent parisien ! Mais, c’était décidé, cet oiseau de malheur m’avait prise en grippe. Je ne sortais qu’avec méfiance et circonspection, chapeau sur la tête et injure à la bouche. Rien n’y faisait. Il ne m’aimait pas. Il fallait que je le sache, que je l’admette et que je le comprenne. Ca peut être entêté un oiseau.
Je regagnais Paris avec soulagement : un autobus ça se voit.. et éventuellement, ça s’évite. Un danger comme on les aime. Septembre arrivait et je reprenais, confiante, la route de l’Ubaye. Qui m’attendait au bout de sa gouttière ? Avait-il passé l’été à guetter mon arrivée ? Se réjouissait-il de pouvoir reprendre ses piqués au-dessus de ma tête ? Oui, mon martinet de juin était là, toujours aussi virulent, vindicatif et agressif. J’ai donc supporté à nouveau, le piaf, les moqueries de mes amis et l’offre d’un casque de pompier. Oserais-je avouer que cet Apopidae, c’est juste pour garder un semblant de dignité, pèse moins de 40 grammes ! J’aurais préféré battre en retraite devant un aigle royal ! Non, j’ai reculé devant une bestiole qui n’aurait pas fait une brochette. Les vacances suivantes, je choisissais un autre point de chute… un village qui s’appelle.."Le Martinet"